Comment la technologie évolue dans les airs

Lu en quelques minutes
Par Ann Brady
Mots clés : AviationTransport
Publié le
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Des avions à commandes de vol électriques, aux appareils supersoniques et hypersoniques, la technologie aéronautique annonce une nouvelle ère du transport aérien. Avec une augmentation du nombre de passagers qui risque dʼêtre phénoménale dans les prochaines décennies, comment les avions vont-ils relever les défis du 21e siècle?

Vous rappelez-vous des Jetson, ce dessin animé américain diffusé brièvement dans les années 1960, puis de nouveau dans les années 1980, qui mettait en scène « la famille du futur ». Cette famille – Les Jetson – vivait dans un monde ultra-moderne, entourée de gadgets automatisés où tout était possible sans effort, à la simple pression dʼun bouton. Pourquoi évoquer ici cette série des années 1960 ? Parce que le monde couleur bonbon des Jetson, avec ses voitures volantes, ses appareils « Hi-Tech » – montres « intelligentes » pour se parler à distance, transports « intelligents », robots et ordinateurs domestiques – était remarquablement visionnaire : sans en porter le nom, lʼInternet des objets y était déjà une réalité.

Revenons dans le monde actuel de plus en plus interconnecté. Nous aussi, nous pouvons prendre lʼavion pour de courts trajets quotidiens ou des déplacements dʼun bout à lʼautre de la planète, mais nos appareils sont nettement moins commodes que les « soucoupes volantes » des Jetson. Notre objectif : gagner rapidement notre destination, au moindre coût possible et – avant tout – en toute sécurité. À cet égard, les progrès réalisés sur les propriétés des matériaux utilisés pour la construction des avions, en améliorant et en augmentant leur performance et leur exploitation, nous ont effectivement aidés à voyager dans le monde entier, plus vite et à moindres frais.

Lʼaviation commerciale est un marché en pleine expansion. Selon lʼInternational Air Transport Association (IATA), lʼindustrie du transport aérien progresse : de 3,8 milliards de passagers enregistrés à ce jour, elle en transportera 7,2 milliards en 2035. Le parc des avions commerciaux, qui compte désormais 100 000 appareils, a dû suivre pour répondre à la demande. Selon lʼOrganisation de lʼaviation civile internationale (OACI), en 2036, environ 94 % du parc des avions commerciaux sera équipé de technologies nouvelle génération.

 

Une demande croissante

Pour lʼindustrie aéronautique, lʼun des grands enjeux est de répondre à cette demande par un rendement énergétique produisant moins dʼémissions de carbone. Face à lʼaugmentation de la demande de transport aérien et lʼimpératif fondamental de sécurité, nous avons radicalement changé le mode de conception, dʼexploitation et de propulsion des avions. Ils sont maintenant 70 % plus économes en carburant quʼen 2010 (rapport Vision 2050 d’IATA). Nous ne sommes pas encore au niveau des Jetson, mais nous nʼen sommes pas loin.

Les grandes compagnies dʼaviation savent quʼavec la croissance de lʼindustrie aéronautique, elles se doivent de veiller à réduire au minimum leur impact environnemental. Comment les grands acteurs du marché procèdent-ils pour gérer lʼaugmentation rapide du trafic aérien avec une efficacité énergétique éliminant lʼempreinte carbone des avions ? Quelles mesures prennent-ils pour mettre au point des avions plus légers, plus intelligents et plus écologiques ?

Les matériaux composites jouent un rôle important. Ils permettent de construire des avions plus légers et moins gourmands en kérosène. Prenez par exemple Boeing. La structure du fuselage de son B787 Dreamliner est pour moitié constituée de matériaux composites. Le Boeing 747 conçu à la fin des années 1960 nʼen comptait que 5 %. Pour souligner davantage son engagement en faveur dʼune production plus écologique, Boeing a récemment salué lʼadoption, par lʼOACI, dʼun système de compensation carbone qui aidera lʼindustrie de lʼaviation internationale à atteindre son objectif de réduction des émissions. Boeing a déclaré à ce propos : « Le système de compensation carbone et la norme de CO2 font partie intégrante de lʼapproche quatre piliers adoptée par lʼindustrie pour stopper la progression des émissions dʼici 2020 et la diminuer de moitié dʼici 2050 par rapport aux niveaux de 2005. »

 

Airplane mechanic

 

Innover sans cesse

Concernant ses propres produits et services, Boeing fait valoir quʼil innove sans cesse afin dʼen améliorer lʼefficacité et la performance environnementale. « Le 787 Dreamliner est une famille dʼavions dont la consommation de carburant et les émissions de CO2 sont de 20 % à 25 % inférieures à celles de ses prédécesseurs. Avec le 737 MAX, qui devrait être mis en service en 2017, la consommation de carburant et les émissions seront réduites de 20 % par rapport au premier 737 de nouvelle génération. »

Airbus, autre leader aéronautique mondial, utilise aussi des solutions innovantes pour améliorer lʼefficacité économique et la performance environnementale de son aviation commerciale. Lʼobjectif du Groupe est lʼéco-efficacité – la construction dʼaéronefs qui réduisent au minimum les effets sur lʼenvironnement, explique Séverin Drogoul, Vice-président, Amélioration des activités dʼentreprise et de la qualité, chez Airbus, qui précise : « Pour atteindre nos objectifs, nous examinons le cycle de vie complet de nos avions ; de la conception à la fabrication, de lʼexploitation à la fin de la durée de vie, et à chaque étape de la vie dʼun avion, nous trouvons des solutions pour améliorer notre performance environnementale. »

Comme le souligne M. Drogoul, Airbus sʼattache à trouver des solutions à ces défis grâce à de nouvelles idées, de nouveaux procédés et de nouvelles technologies. Dans cette optique, lʼéco-efficacité est « intégrée » dans le développement de tous les produits, opérations industrielles et services dʼAirbus.

 

Les matériaux ont leur importance

Ces perspectives sont très prometteuses pour lʼavenir, mais comment être sûrs que les passagers – et la planète – y seront gagnants ? Le nouveau sous-comité de lʼISO sur les matériaux, ISO/TC 20/SC 18, travaillera dans ce sens.

Le domaine des travaux du nouveau sous-comité couvrira la normalisation des matériaux et processus connexes utilisés par les constructeurs aéronautiques et les motoristes. Ainsi, les concepteurs seront amenés à recourir davantage à des Normes internationales, plutôt que de faire appel à des normes nationales ou régionales distinctes, voire à des normes dʼentreprise. Tout en spécifiant les exigences industrielles des matériaux sous la forme de Normes internationales, la normalisation proposée prendra en considération les aspects environnementaux. Elle permettra, au moment dʼadopter de nouvelles solutions techniques, de réfléchir aux questions dʼobsolescence et de renouvellement des produits utilisés par les fabricants dʼaéronefs et les motoristes.

Compte tenu de lʼémergence accélérée de nouveaux produits et matériaux dans lʼindustrie aéronautique, la normalisation des matériaux composites utilisés par les fabricants dʼaéronefs et les motoristes est parfaitement opportune. Elle permettra de répondre à un double impératif : améliorer la communication technique au sein de la chaîne dʼapprovisionnement et indiquer aux organismes de certification de la navigabilité des avions quels sont les défauts acceptables. Au vu de la concurrence que se livrent les principaux acteurs de lʼaviation dans tous les domaines, le nouveau sous-comité est de toute évidence appelé à jouer un rôle clé.

 

Nouvelles opportunités

Infographie: L'avion du futur prend son envol
L'avion du futur prend son envol

Lʼindustrie aéronautique prend également part à lʼéconomie circulaire. Des produits à base de fibres végétales sont utilisés pour gagner en légèreté et accroître les possibilités de recyclage, et les matériaux intérieurs des avions sont maintenant presque tous faits de composants recyclés. Grâce aux nanotechnologies, les revêtements intérieurs des cabines sont également légers et « auto-rafraîchis », pour donner toujours lʼapparence du « neuf ».

EasyJet, par exemple, a été lʼune des premières compagnies aériennes commerciales à utiliser sur ses avions un « nano-revêtement » en polymère repoussant la saleté et la poussière de manière à réduire le frottement. Résultat : 2 % dʼéconomie sur la facture de carburant.

Les Jetson étaient, on lʼa vu, environnés dʼobjets interconnectés. Quel sera lʼimpact de lʼInternet des objets (IoT) sur lʼindustrie de lʼaviation actuelle et à venir ? Pour Peter Ryan, Membre honoraire du Defence Science and Technology Group, Division aérospatiale, au sein du ministère de la défense australien, « lʼaviation est fortement réglementée, lente à adopter des changements et très axée sur la sécurité. Une solide analyse de rentabilisation serait nécessaire pour opérer un changement radical et adopter les technologies de lʼIoT ». De son point de vue, lʼintroduction de lʼIoT dans lʼaviation interviendra progressivement au cours des cinq prochaines années, principalement dans les opérations au sol, par exemple pour la manutention des bagages (déjà en usage dans certains aéroports).

 

Augmenter lʼefficacité

Selon M. Ryan, à partir de 2020-2025, lʼIoT jouera un rôle plus important dans la logistique et la maintenance des avions, et à partir de 2025-2030, lʼIoT sera introduit dans les opérations de vol pour améliorer les performances de lʼavion. LʼIoT permettra également dʼaméliorer lʼefficacité des avions. Le système de surveillance des avions sera renforcé par des dispositifs IoT qui fourniront des diagnostics sur les performances. Les moteurs modernes, par exemple, peuvent actuellement comporter jusquʼà 200 capteurs ; les futurs moteurs pourraient compter 5 000 capteurs pour collecter de grandes quantités de données sur les performances et améliorer ainsi lʼefficacité.

Concernant la sécurité, M. Ryan fait valoir que lʼinterconnexion des avions permet dʼéviter des accidents et de calculer les trajectoires de vol optimales afin de réduire les temps de déplacement et la consommation de carburant. À lʼheure actuelle, la position des aéronefs est principalement surveillée depuis le sol et seuls les contrôleurs aériens ont une image complète de la localisation des avions (même si le suivi par satellite gagne du terrain).

Dʼautres compagnies aériennes ont déjà commencé à utiliser ou à tester des technologies, notamment :

  • Des dispositifs portables ou implantés pour lʼenregistrement de données physiologiques (fréquence cardiaque et tension artérielle) des membres dʼéquipage afin dʼévaluer la charge de travail
  • Des capteurs intégrés dans les sièges pour informer le personnel navigant de lʼexpérience des passagers et fournir des données pour les améliorations technologiques futures à apporter (qualité de divertissement) et les services à bord (qualité et distribution des repas)
  • Des bagages intelligents avec suivi GPS et des capteurs IoT pour la communication de la localisation afin dʼaccélérer les processus de lʼaéroport

M. Ryan ajoute que les dispositifs IoT pourraient améliorer également le pilotage en donnant un retour dʼinformation instantané, non seulement au pilote quant à la position et à lʼétat de son propre avion, mais aussi sur les appareils à proximité. Ils peuvent également alerter sur les risques météorologiques extrêmes.

 

High tech robotic welder in a modern metal factory

 

Repousser les limites

Boeing célébrait son centième anniversaire en 2016. Dans le numéro de juillet 2016 du magazine Frontiers, Boeing décrit sa propre vision pour les cent prochaines années, une vision fondée sur « notre esprit dʼaventure et de désir continu dʼexplorer lʼunivers ». Brian Tillotson, Ingénieur en chef, Recherche et Technologie chez Boeing, envisage lʼétablissement dʼune colonie dans lʼespace pour les familles de lʼavenir. « Comme dans le dessin animé, toute la question est de savoir comment réparer les tuyaux, tondre le gazon et élever des enfants dans cet environnement ? »

Kevin Bowcutt, expert en hypersonique chez Boeing, veut pour sa part construire un avion hypersonique capable de faire le tour du globe en quelques heures. Cʼest parfaitement dans la logique de ce que sera notre monde entièrement automatisé. « Il vous suffira de saisir la destination « Paris » sur votre téléphone ; un véhicule sans chauffeur viendra vous chercher à domicile, votre téléphone sonnera pour vous indiquer son arrivée devant chez vous. Vous nʼaurez quʼà monter à bord pour être conduit à lʼaéroport, vos bagages y seront pris en charge et vous nʼaurez plus quʼà prendre place dans un avion ou dans un hyper-métro qui vous transportera de lʼautre côté de lʼocéan. »

 

Des solutions dans le ciel

Airbus a également planché sur sa vision pour lʼavenir. Comme le précise M. Drogoul, dʼici 2030, 60 % de la population mondiale vivra dans les villes, soit 10 % de plus quʼaujourdʼhui. Les embouteillages seront encore pires et ils pèseront lourdement sur lʼéconomie. Pour relever ce défi, les experts dʼAirbus cherchent, bien entendu, des solutions dans le ciel « pour mettre au point des concepts radicaux qui soulageront la congestion urbaine ». Travaillant avec lʼA3, son avant-poste de lʼinnovation à la Silicon Valley, Airbus poursuit un projet baptisé Vahana, que M. Drogoul décrit comme « une plateforme autonome volante pour le transport de passagers et de fret ».

Richard Branson, fondateur du Groupe Virgin, a annoncé récemment prévoir de nouveaux vols de passagers supersoniques outre-Atlantique, dévoilant un avion prototype capable de relier Londres et New York en trois heures et demie. Il sʼest associé dans cette opération à Boom, une start-up basée à Denver, dont le fondateur et PDG, Blake Scholl, affirme : « Les avions à réaction existent depuis près de soixante ans, mais nous volons encore à la même vitesse que dans les années 1960. Les concepteurs du Concorde nʼavaient pas la technologie pour des voyages supersoniques abordables, maintenant nous lʼavons. »

Des commandes de vol électriques, aux appareils supersoniques et hypersoniques, lʼévolution dans le domaine de lʼaviation nʼa jamais été aussi stimulante. Calez-vous bien dans votre siège, attachez votre ceinture et préparez-vous au décollage. Les Jetson ne sont peut-être pas si loin. 
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Elizabeth Gasiorowski-Denis

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